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Fatou Diome : "J’ai trop de respect pour l’Afrique pour accepter qu’elle soit à genoux."

La célèbre auteure franco-sénégalaise Fatou Diome présente son dernier livre et nous parle d'elle... et du monde !
Un entretien mené par Sinatou Saka pour RFI.
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Je m’appelle Fatou Diome, je suis franco-sénégalaise et mon dernier livre s’appelle « Les Veilleurs de Sangomar ».
C’est une jeune femme qui a perdu l’amour de sa vie pendant la catastrophe maritime du Joola, au Sénégal, en 2002, et donc elle est recluse pendant quatre mois et dix jours pour son veuvage. Pendant ce temps-là, elle regarde sa petite fille, pense à son mari, écrit pour raconter leurs histoires et toutes ses révoltes quotidiennes.
---- Comme tous les livres, ça vient d’une réflexion lancinante… Je pensais à cette catastrophe, et plus j’y pensais, plus je réfléchissais au nombre incroyable de personnes touchées par cette catastrophe… Toutes ces personnes doivent continuer à vivre sans avoir trouvé de réponses à leurs questions.
Comment vit-on avec l’absence ? Comment survit-on au deuil de l’amour ? Quand on a aimé quelqu’un et qu’on a imaginé passer le reste de sa vie avec elle, et que cette personne-là disparait ?
Comment se relever ? À quoi s’accrocher ? Ce sont ces questions que ce livre essaie de traiter avec Coumba. L’exemple de cette catastrophe est un terrain de réflexion. C’est pareil pour les victimes d’attentats ou d’accidents d’avion. C’est la perte brutale d’un être cher. Comment on survit à cela ?
---- C’est le personnage de Coumba qui écrit. Elle écrit parce que les humains n’ont pas la patience d’écouter. Posez-vous la question, quand vous êtes vraiment triste. Vous pensez que les gens ont le temps d’écouter tout ce que vous avez à dire ? Au bout d’un certain temps, ils perdent l’attention. Un cahier, il a la patience d’écouter. Vous pouvez arrêter aujourd’hui et continuer demain. Il écoutera tout, le cahier. Il a une générosité de recevoir qui vous êtes, tel que vous êtes. Il ne vous mentira pas et il ne vous jugera pas non plus. Écrire, c’est essayer de comprendre justement l’existence. Écrire, c’est une manière d’assumer son existence. C’est une manière de tenir debout.
---- Je suis sérère et j’écris en langue française. J’ai grandi au Sénégal et, comme la majorité des Sénégalais, je comprends le wolof. Le français, le wolof et le sérère étaient dans mon environnement. Toutes ces langues cohabitent dans ma tête. Donc quand j’écris, c’est du matériau pour m’amuser entre les deux. Parfois, j’utilise un mot sérère pour son sens historique, sociologique ou religieux. Mais aussi dans ce livre, j’ai décidé de créer moi-même les prénoms de mes personnages, sauf quelques exceptions comme Bouba ou Coumba. Parce que les Sérère pratiquaient ce qu’on appelle l’anthroponymie. Quand un enfant naissait, on lui choisissait un prénom qu’on fabriquait avec un vœu. Par exemple, Jeegan : celui qui possède, ou celui qui ne sera jamais pauvre. Et cette manière de désigner ou de nommer le bébé en lui souhaitant quelque chose, j’ai voulu l’appliquer dans ce livre parce que c’était un rappel de ce côté poétique de la culture et de la langue sérère.
---- Être femme et être féministe, pour moi c’est un pléonasme. On est une femme, on milite pour les droits humains. Donc forcément, le féminisme, c’est une partie des droits humains. Je défends les droits humains. Je suis pour la liberté, le bien-être, la justice pour toutes les femmes et ce, où qu’elles soient. Nous avons le droit de vote en tant que femme. Aujourd’hui, nous avons le droit de détenir des comptes bancaires ; il faut savoir que cela n’a pas toujours été comme ça. Si nous pouvons avoir les libertés dont nous jouissons aujourd’hui, c’est parce qu’il y a des ainées qui se sont battues pour les défendre. La seule manière pour moi de les mériter, c’est de continuer à défendre ces acquis-là pour que les générations derrière nous puissent aussi en profiter.
--- J’ai ma vision de l’Afrique parce que je suis aussi africaine que les gens qui me font des critiques. Le sort de l’Afrique, ce n’est pas seulement une personne qui va réfléchir et créer ce devenir. C’est nous tous ensemble !
L’Afrique est une partie du monde. Et nous devons conquérir notre place de dignité à travers nos actions, ce que nous faisons et comment nous vivons en Afrique. Comme disait Wole Soyinka, le tigre ne proclame pas sa tigritude, il saute sur sa proie et la dévore.
J’ai beaucoup trop de respect pour l’Afrique pour accepter qu’elle soit à genoux.
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7 сентября 2019 г. 20:00:11
00:05:21
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